À moins d’une semaine de l’échéance référendaire, les deux camps se comptent, s’ils ne se cherchent pas, encore et toujours. Sûr de son poids et de son charme mobilisateur, le camp du OUI s’est cassé les dents le jeudi dernier à Yirimadjo au grand espoir de la Coalition du NON qui cherche un abri pour tenir sa conférence de presse. On pensera que là, tout est joué. Or, c’est la ligue de tout un régiment de colonels, d’honorables conseillers du CNT, d’éminents membres du gouvernement, de cadres des départements ministériels et de l’État, de tout ce que compte la République à la rescousse de la Transition qui a fait flop au stade du 26 Mars. Malgré la débauche des moyens publics mis en œuvre… A qui la faute, ce sont-ils raillés sur les réseaux sociaux et dans les ‘’grins’’ ?

Officiellement tenu sous la responsabilité du mandataire du camp du OUI, l’éternel Boureima Allaye TOURE du Conseil national la société civile, mais piloté de mains de maitre depuis les hauts sommets de l’État, le meeting du 8 juin a déçu plus d’un. Et pire encore, il a donné l’occasion de jauger la capacité réelle de mobilisation du Camp du OUI, incapable de remplir un stade de 50 000 places alors qu’il entendait mobiliser au moins des milliers de Maliens pour être pris au sérieux. A moins qu’on ne fasse, comme par le passé : bourrer les urnes et tenir le référendum où aucune âme ne vive. Pourvu que le OUI passe. Et crier sur tous les toits : «c’est grâce à nous, ce n’est pas le travail Choguel»…

Remake trompeur
Et comme rien ne peut et ne doit se passer comme par le passé, ceux qui ont empoché les 20 ou 21 millions à la veille du meeting, veulent remettre ça : bis repetita. Un remake trompeur pour encore duper le président Assimi qui semble avoir fait sa religion sur ces voltigeurs politiques en compétition.
Sauf qu’entre eux et Batouly, nul ne sait qui a la carte maitresse, tant on dirait que ce n’est pas le même camp du OUI. Les revanchards des gradins du 8 juin optant pour le vendredi, tandis que la dame donne rendez-vous jeudi. Et si ce beau monde travaillait ensemble au triomphe du OUI dans les urnes le dimanche ?
Pas très évidents au regard des ambitions et des retombées financières en jeu (chaque délégation régionale ayant été doté d’au moins une vingtaine de briques). Et tant pis pour le OUI. Après tout, c’est le projet de Assimi, eux ils ont eu leur part comme sous IBK, comme sous ATT, comme sous Alpha pour certains.
Et l’histoire de ce pays a prouvé que certains ne peuvent même pas mobiliser des cabris de leur localité. Donc normal que tu trouves des «Bo yoro djan » à Sikasso et des «bo Yoro Souroun» à Gao. Tout ça : à l’insu des forces du changement, tenues à l’écart depuis le début de la campagne référendaires comme des pestiférés.
Ceux qui veulent berner le président Assimi Goïta sur le poids électoral qu’ils n’ont jamais eu au Mali sont-ils cependant les seuls dans la fourberie et dans la duplicité ?

Parce que, tout bonnement, d’autres ont décidé de jouer leur rôle à leur place, pardon de se liguer en se donnant les moyens pour les mettre hors circuit. Ceux qui estiment en effet que le référendum est plus une affaire d’institutionnels que politiques, d’officiels que de citoyens se sont constitués en Collectif pour plus défendre leur avenir dans le jeu politique que la victoire du OUI, le 18 juin, prétexte de leur rassemblement.
Le fameux Collectif dit d’acteurs institutionnels composé des membres du gouvernement, du Conseil national de Transition (CNT), du Haut conseil des collectivités (HCC) et du Conseil économique social et culturel (CESC) et d’autres membres du gotha étatique dit vouloir tenir une série de grands meetings : le mercredi 14 juin à Mopti (Centre), Tombouctou et Gao (Nord) et le jeudi 15 juin à Ségou (Centre), Kayes (Ouest), Koulikoro (Pres de Bamako) et Sikasso (Sud)… Et le clou, vendredi au stade du 26 Mars.

Le reniement politique
Quand par couardise les politiques abdiquent de leurs vocations et missions pour plaire et complaire dans l’expectative voire la confusion, ils envoient la démocratie à l’abattoir. Incapables de prendre position ou reniant simplement ses convictions et ses prises de positions antérieures, des partis politiques font la queue leu-leu dans leur appel à voter OUI s’ils ne trouvent pas l’excuse de laisser le libre choix aux militants. La discipline partisane, alors fout le camp, comme le dirait les militaires.
L’argument spécieux, sinon, la fourbe brandie par certains partis politiques consistant à faire du contrat social issu du référendum une affaire citoyenne ne tient pas la route, et ne trompe personne. Si le texte qui définit pour l’avenir la gestion de l’État, l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics, les droits et les devoirs du citoyen n’est pas une affaire politique, la politique n’a plus sa raison d’être au Mali. Parce que ça dire que nos partis politiques, en tout cas ceux qui fuient leur responsabilité historique en se barricadent derrière «le livre choix» de leurs militant, n’ont pas vision politique.
Faut-il rappeler que les partis politiques ont pour objectif la conquête et l’exercice du pouvoir afin de mettre en œuvre la politique annoncée. Si en démocratie la conception traditionnelle est que le pouvoir exécutif est en charge de l’intérêt national indépendamment des partis, ceux-ci assurent bien la conduite de la politique nationale, par l’intermédiaire de leurs représentants au gouvernement et dans la majorité parlementaire. Ils légitiment et stabilisent le régime démocratique, en le faisant fonctionner.
Animateurs du débat politique, ils contribuent aussi à structurer l’opinion publique. Le but d’un parti politique est d’influencer le pouvoir politique en place, en le soutenant, si celui-ci en est issu, ou en s’y opposant. Sommes-nous dans ce cas au Mali ? Ces messieurs/dames salivent seulement pour les places.

Petite mise au point
Les référendums, loin de diviser les Partis politiques, contribuent en fait à les consolider. Dans les démocraties modernes, même en transition, lorsqu’un État a recours au référendum, au lieu de s’appuyer sur leurs députés au Parlement, les partis doivent alors s’engager dans un débat public et convaincre les électeurs sur la question en jeu et qui engagent l’avenir de la nation.
Le scrutin référendaire constitue un mode binaire de prise de décision (OUI ou NON) qui contraste fortement avec le travail collaboratif et la délibération des systèmes démocratiques. Toutes choses qui obligent donc les partis politiques à former des alliances inhabituelles. Comme le PS Yelen Koura, «chef de file de l’opposition», qui appelle bruyamment à voter OUI.

La duplicité à ciel ouvert
Aussi, peut-on comprendre que les questions référendaires sont clivantes sur lesquelles il est donc difficile de préserver l’unité interne du parti ? Est-ce la raison pour laquelle que certains partis et non des moindre (Yelema et le RPM-Tréta) ont appelé leurs adhérents à suivre leur opinion personnelle pour ce qui est du 18 juin et à ignorer les positions antérieures du parti.
Ironie du sort, ce référendum aurait pu être l’occasion pour le RPM, par exemple, de sceller son unité en lambeau depuis la chute d’IBK et le fameux Comité central qui a fait de Tréta roi à la place du ROI. En tout cas, c’était l’opportunité pour beaucoup de partis d’éviter la scission, si tant est que le OUI de tout le monde est sincère et que le NON de certains n’est pas hypocrite.

Sous la Transition, déchirés de plus en plus par de fortes tendances qui remettent en cause de plus en plus leur leadership traditionnel des caciques trônant depuis des lustres, les partis politiques jouent les troubadours de la kermesse référendaire. La quasi-majorité des formations politiques, à l’exception notable de la CODEM, se sont alignés derrières les colonels, d’autres ralliés au projet de la nouvelle Constitution par escroquerie et parjure politique. Qui l’aurait cru ?
Le Cadre pour le retour à l’ordre constitutionnel qui s’esclaffait sur les déboires de la Transition soudainement trouve génial la trouvaille des colonels et appelle à voter OUI. Aucun parti du cadre, à l’exception de l’UDD, n’appelle à voter NON.
Qu’est-ce qui reste de l’opposition à la Transition dirigée par le colonel Assimi Goïta ?
Des menus fretins, des nostalgiques, des hybrides, pardon des alter-politiques qui estiment que la nature ayant horreur du vide, puisque tout le monde dit Oui, il faut dire NON pour se faire voir et valoir. Les arguments du Parena sont respectables, mais comment expliquer l’opposition hystérique de la CENAS ou de la CMAS ? Quid des fantassins de la 25ème qui estiment que l’heure n’est point à un référendum et qu’il faut surseoir à ce projet clivant, avant qu’il ne soit trop tard. Comme s’ils se levaient d’un cauchemar ou d’un coma qui les plonge dans un contexte où les jeux sont déjà faits (les hommes en tenus ont déjà voté). Pour reprendre l’adage bamanan : kele mi sera so da la, Moriba-Yassa don bana.
Après l’on va s’étonner du résultat du référendum et du système qu’il va engendrer !

PAR SIKOU BAH

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