Alors que se tient dans la capitale ghanéenne une énième rencontre entre les responsables de l’UE, du Royaume-Uni, de l’Afrique de l’Ouest et de l’ONU pour discuter des actions futures en matière de sécurité et de stabilité au Sahel, Londres annonce avec fracas ce lundi 14 novembre son retrait anticipé de la Minusma, suivant en cela l’option de Paris et de ses autres alliés européens de quitter notre pays. Comme si une mauvaise nouvelle ne vient jamais seule, ce mardi 15 novembre, sans crier gare et sans avancer de raisons spécifiques que celles aisément devinables, la Côte d’Ivoire voisine annonce elle aussi son retrait progressif immédiat de la Minusma à partir d’août 2023. Qu’est-ce qu’il y a nouveau dans le ciel malien qui motive ces retraits en cascade ?

Contrairement au contingent ivoirien, la force anglaise forte de 250 hommes a été déployée dans notre pays à la mi-2020 pour trois ans. Donc en principe, elle devrait arriver en fin de mission dans six petits mois. Les britishs ont-ils perdu le flegme légendaire, pardon leur patience pour anticiper leur retrait ? Des fouineurs de l’autre côté disent que l’engagement britanique devait en principe durer trois ans, mais face à la montée de l’instabilité, Londres a décidé d’anticiper le retrait de ses troupes, qui devraient quitter le pays dans les six prochains mois. Toutes choses qui ressemblent à un repli stratégique…Donc l’argument Wagner c’est du pipeau.
Devant la Chambre des communes, le secrétaire d’État Britannique aux forces armées, James Heappey, ne passe pas par quatre chemins pour crucifier notre pays : « deux coups d’État en trois ans ont sapé les efforts internationaux pour faire avancer la paix… Nous quittons la mission de la MINUSMA plus tôt que prévu et sommes, bien sûr, attristés par la façon dont le gouvernement de Bamako a rendu si difficile pour les nations bien intentionnées de rester là-bas. Nous devons être clairs sur le fait que la responsabilité de tout cela incombe à Bamako… ». Et pour cette raison selon lui, «le partenariat du gouvernement malien avec le groupe Wagner est contreproductif pour la stabilité et la sécurité à long terme dans la région ». Le gouvernement britannique « ne peut pas déployer l’armée nationale pour assurer la sécurité quand le gouvernement du pays hôte n’a pas la volonté de travailler avec nous pour apporter une stabilité et une sécurité durables ». Cela ne rappelle-t-il pas mot-à-mot l’argutie marconiennes ?
Comme s’il avait prêté les éléments de langage à Macron, le secrétaire d’État britannique aux forces armées, James Heappey, explique que le retrait de ses troupes de notre pays ne signifie pas que le Royaume-Uni se détourne complètement de ses engagements au Sahel.
« Nous travaillons, dit-il, étroitement avec nos alliés pour étudier les options afin de rééquilibrer notre déploiement aux côtés de la France, de l’Union européenne et d’autres alliés partageant nos valeurs. Le Royaume-Uni poursuivra son engagement au Mali et au Sahel à travers notre aide humanitaire, de stabilisation et de développement, en travaillant en étroite coopération avec nos partenaires », a-t-il expliqué.
Comme le Niger, la Côte d’Ivoire s’est-elle inscrite dans ce nouveau partenariat en retirant ses troupes dans notre pays ? La lettre en date du11 novembre 2022 de la Mission Permanente de la République de Côte d’Ivoire au Sociétaire Général Adjoint aux Opérations de Paix (DFO) des Nations unies ne le dit pas, tout comme elle énonce aucune raison causale de retrait.
Mais le gouvernement ivoirien qui a décidé le 28 octobre 2022 de ce retrait facilement devinable en liaison avec l’affaire des 49 mercenaires qui s’enlise dit être « disposé à redéployer les contingents retirés du Mali, dans les autres missions onusiennes de maintien de la paix ». Donc en clair, la raison du retrait ivoirien c’est le Mali. Qu’est-ce que cela implique ?
« La relève de la compagnie de protection basée à Mopti ainsi que le déploiement des officiers d’État-Major (MSO) et des Officiers de Police (IPO), prévus respectivement en octobre et novembre 2022, ne pourront plus être effectués. De même, la Côte d’Ivoire n’envisage pas relever, en août 2023 les militaires et autres éléments présents au sein de la Force de la MINUSMA.
Le Gouvernement ivoirien serait donc reconnaissant au Département des Opérations de Paix (DPO) des dispositions idoines qu’il lui plaira de prendre en vue de la mise en œuvre immédiate de cette décision.
Par ailleurs, le Gouvernement ivoirien agrée le plan de retrait ordonné et sécurisé proposé par le DPO et voudrait l’assurer de sa volonté de rester engagé au service de la paix ».
Au-delà des effets d’annonce désastreux en pleine guerre communicationnelle, il était prévisible ces retraits, y compris ivoirien ; tout comme il serait prudent d’envisager des lendemains diplomatiques compliqués avec la Côte d’Ivoire, bref la France et ses alliés. La limitation de l’impact de ces retraits (environ un millier de soldats sur 12.000) ne doit toutefois pas distraire la vigilance ni de la Minusma ni des Fama. En dépit des retraits anticipés ou progressifs, la vérité est que la lutte contre le terrorisme sera un engagement de longue haleine.

PAR SIKOU BAH

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