Le Conseil de sécurité des nations-unies a examiné ce vendredi 27 janvier 2023 le le rapport du secrétaire général sur l’examen interne de la MINUSMA et en filigrane l’avenir de la Minusma à la lumière de la situation sur le terrain, des propositions du Secrétaire général et des propositions des membres du conseil. A cette importante réunion, notre pays était représenté par le ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale Abdoulaye Diop qui avait à ses côtés le représentant permanant du Mali auprès des Nations-Unies, l’ambassadeur Issa Konfourou. L’ordre du jour naturellement du conseil était la situation au Mali fait par le Représentant spécial du Secrétaire général au Mali et Chef de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA).

Rappelant que nous sommes à mi-chemin du cycle du mandat de la Mission tel que renouvelé en juin 2022, El-Ghassim Wane a noté que notre pays débute une année critique sur la voie du retour à l’ordre constitutionnel, avec plusieurs scrutins prévus à partir de mars.

Le réquisitoire du
chef de la Minusma
Sur le plan sécuritaire, le Chef de la Minusma a évoqué la complexité de la situation, en particulier dans le centre et dans la zone des 3 frontières entre le Burkina Faso, le Mali et le Niger. Il a mentionné des affrontements entre le JNIM et l’EIGS, comme cela a été observé en divers endroits en décembre dernier et en ce mois de janvier 2023, et la poursuite des attaques délibérées de ces deux groupes contre les populations civils innocentes. Selon lui, dans le centre du pays, les FAMas (Forces armées maliennes) ont intensifié leurs efforts, ce qui a permis une amélioration nette dans certaines localités et une diminution du nombre d’incidents de sécurité. Toutefois, s’empresse-t-il d’ajouter, les groupes terroristes conservent la capacité de mener des opérations coordonnées complexes, comme en témoignent les attaques revendiquées par le JNIM dans le cercle de Tenenkou et dans le cercle de Macina le 10 janvier.

Sur le plan humanitaire, El-Ghassim Wane, estime qu’au mois de décembre 2022, le nombre de déplacés internes s’élevait à 412 387, tandis que 8,8 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire, soit 17% de plus qu’au début de l’année 2022. Dans le même temps, 2 millions d’enfants de moins de 5 ans restent affectés par la malnutrition aiguë. La sécurité du personnel humanitaire reste une préoccupation majeure, puisqu’en 2022, 124 incidents ont touché le personnel humanitaire, dont 5 travailleurs humanitaires tués dans les régions de Kayes, Ménaka et Ségou, ajoute le chef de la Minusma.

Le respect des droits humains et du droit international humanitaire dans la conduite des opérations militaires et l’obligation de rendre des comptes en cas de violations sont de la plus haute importance pour faire efficacement face au fléau du terrorisme et de l’extrémisme, a dit M. Wane.
Selon le Chef de la Minusma, la dernière évaluation de la situation des droits humains pour le dernier trimestre de 2022 a révélé que le nombre global de violations a légèrement diminué et que les groupes terroristes en étaient les principaux auteurs avant de promettre que la Minusma continuera d’enquêter sur les allégations de violations et d’abus des droits humains, comptant sur la pleine coopération des autorités maliennes.

Sur le plan du processus électoral, El-Ghassim Wane a rappelé que « le Mali est à moins de deux mois du référendum constitutionnel qui marquerait le premier d’une série de scrutins qui devraient culminer avec le rétablissement de l’ordre constitutionnel en mars 2024 ». Cependant, il a évoqué des défis sur la pleine opérationnalisation de l’Autorité indépendante de gestion des élections, ce qui nécessite la mise en place de bureaux locaux à travers le pays, ainsi que la finalisation du processus de révision constitutionnelle en cours. Sur ce dernier point, au vu des réactions des différentes parties prenantes, le Président de la transition a mis en place (le 27 janvier 2023) un comité de 51 membres pour finaliser le projet et assurer une adhésion suffisante au sein de la société malienne.
Pour la suite du processus électoral, le chef de la Minusma a dit que cela dépendra de la disponibilité des ressources financières et logistiques nécessaires. Or à ce jour, seulement 60% des ressources nécessaires au Fonds commun des Nations Unies pour l’appui électoral ont été mobilisées. En outre, « l’évolution de la situation sécuritaire affecte toutes les étapes du cycle électoral ». Aussi, le Chef de la Muinusma promet que la MINUSMA apportera tout le soutien possible aux autorités maliennes dans leurs efforts pour sécuriser le processus électoral, a-t-il assuré.

Au sujet de l’Accord pour la paix et la réconciliation, M. Wane a relevé que malgré des avancées, au cours des deux derniers mois, de nouveaux défis sont apparus avec un désaccord sur le niveau de participation du Gouvernement aux sessions ordinaires du Comité de suivi de l’Accord. Cela a abouti à la décision des mouvements en décembre de suspendre leur participation au processus de paix. Des discussions de suivi ont eu lieu à Alger, avec la visite, les 14 et 15 janvier, du Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale et du Ministre en charge de la réconciliation nationale.
EL-Ghassim Wane conclura que la stabilisation du Mali est essentielle non seulement pour le pays lui-même mais aussi pour toute la région.

Pour ce qui est de l’appui et à la coordination opérationnelle demandés par les autorités, le représentant spécial du secrétaire général de l’ONU estime qu’à l’avenir, la capacité de la MINUSMA à contribuer efficacement à l’amélioration de la situation sécuritaire en appui aux Forces de défense et de sécurité de notre pays dépendra d’un certain nombre de facteurs ou paramètres pour ne pas dire préalables. Le premier facteur a trait à la mise à disposition des capacités requises et le remplacement en temps voulu des pays contributeurs sur le départ.
Deuxièmement, préconise le chef de la Minisma, il est nécessaire de renforcer la coordination avec les Forces de défense et de sécurité maliennes, conformément aux dispositions pertinentes du mandat de la Minusma et au protocole d’accord de novembre 2017 entre la MINUSMA et le Mali. L’utilisation judicieuse des ressources et des capacités existantes est primordiale, notamment pour la protection des civils.
El-Ghassim Wane insistera, dans ce volet, sur le respect de la liberté de mouvement, conformément à l’accord sur le statut des forces.
Dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, le Représentant spécial a estimé que la stratégie pour la stabilisation des régions du centre, adoptée par le Gouvernement en aout dernier, est « un pas important dans la bonne direction ».

La réplique du ministre Diop
Prenant la parole devant le Conseil de sécurité des nations-unies, Ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale Abdoulaye Diop, a salué la convergence de vues entre le Mali et la Minusma sur les avancées notables réalisées durant la période sous examen sur le plan politique. En effet, le Gouvernement poursuit, explique-t-il, la mise en œuvre des réformes politiques et institutionnelles dans le cadre d’un processus « transparent et inclusif ». À la suite de la remise du projet de la nouvelle constitution au Chef de l’État et Président de la transition, le colonel Assimi GOITA, la Commission de finalisation poursuit les concertations avec les forces vives de la nation, afin de parvenir à un texte fondamental de large consensus, qui sera soumis pour approbation aux Maliens par référendum en mars 2023. Le Gouvernement s’attèle aussi à la mise en œuvre d’autres actions prioritaires, notamment l’élection des conseillers des collectivités territoriales en juin 2023; l’élection des députés à l’Assemblée nationale en octobre et novembre 2023; et l’élection du Président de la République en février 2024, a assuré le ministre Diop.
Au sujet de l’Accord pour la paix et la réconciliation, issu du processus d’Alger, Abdoulaye Diop a réitéré l’engagement du Gouvernement à poursuivre sa mise en œuvre, en citant des progrès indéniables, notamment dans le cadre du processus de désarmement, démobilisation et réintégration. Le Gouvernement a également adopté la décision portant création de la Commission ad hoc chargée de résoudre les questions en suspens relatives à la chaîne de commandement au sein des Forces de défense et de sécurité nationales et à l’intégration des hauts fonctionnaires civils des mouvements signataires dans les institutions gouvernementales, dit-il. Les aspects de l’Accord liés au développement ont également fait l’objet d’une attention soutenue de la part du Gouvernement, qui œuvre à rehausser le développement des régions du Nord, a expliqué M. Diop. Malgré ces progrès indéniables, la période sous examen du conseil (dernier trimestre de 2022) a aussi été marquée par la suspension de la participation des groupes signataires aux mécanismes du Comité de suivi de l’Accord. À ce sujet, le Gouvernement espère parvenir dans un proche délai à une compréhension commune avec « ses frères » des mouvements signataires, espère le ministre Diop.

Sur le plan sécuritaire, a poursuivi le ministre, le gouvernement de la transition regrette, une fois de plus, que le rapport du Secrétaire général « passe sous silence les efforts et les actions menés par les Forces de défense et de sécurité maliennes dans le cadre de la sécurisation du territoire et de la protection des civils ». Or, les Forces restent déterminées à poursuivre les actions offensives lancées en décembre 2021 et visent à prévenir et à combattre les attaques indiscriminées ou de représailles des groupes extrémistes contre les populations civiles et leurs biens, a-t-il affirmé. De plus, dans le cadre de la nouvelle stratégie intégrée pour le centre, l’État renforce sa présence sur le territoire, contrairement aux chiffres fournis dans le rapport, contredit Diop.

Concernant les défis opérationnels de la MINUSMA, le chef de la diplomatie malienne a noté que le rapport du Secrétaire général reconnaît les acquis de la nouvelle procédure de demande de vols mise en place le 15 novembre 2022. Elle a permis d’augmenter le nombre de vols approuvés, à travers une coordination décentralisée et une clarification des responsabilités. Ces résultats encourageants, explique-t-il, sont malheureusement mitigés du fait du partage parfois partiel ou inexploitable des informations recueillies par les drones, a-t-il expliqué, en espérant que les attentes de la partie malienne seront prises en charge.

Affaire à suivre

PAR SIKOU BAH

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